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10 décembre 2007 1 10 /12 /décembre /2007 21:08

un peu de lecture comme ça, parce que je l'ai partagé aujourd'hui avec d'autres étudiants, pour ceux qui passeraient par là... un texte étonnant d'actualité, écrit il y a 167 ans.

"Il y a un passage très périlleux dans la vie des peuples démocratiques.

« Lorsque le goût des jouissances matérielles se développe chez un de
ces peuples plus rapidement que les lumières et que les habitudes de la
liberté, il vient un moment où les hommes sont emportés et comme hors
d’eux-mêmes, à la vue de ces biens nouveaux qu’ils sont prêts à saisir.
Préoccupés du seul soin de faire fortune, ils n’aperçoivent plus le lien
étroit qui unit la fortune particulière de chacun d’eux à la prospérité
de tous. Il n’est pas besoin d’arracher à de tels citoyens les droits
qu’ils possèdent ; ils les laissent volontiers échapper eux-mêmes(…)

« Si, à ce moment critique, un ambitieux habile vient à s’emparer du
pouvoir, il trouve que la voie à toutes les usurpations est ouverte.
Qu’il veille quelque temps à ce que tous les intérêts matériels
prospèrent, on le tiendra aisément quitte du reste. Qu’il garantisse
surtout le bon ordre. Les hommes qui ont la passion des jouissances
matérielles découvrent d’ordinaire comment les agitations de la liberté
troublent le bien-être, avant que d’apercevoir comment la liberté sert à
se le procurer ; et, au moindre bruit des passions politiques qui
pénètrent au milieu des petites jouissances de leur vie privée, ils
s’éveillent et s’inquiètent ; pendant longtemps la peur de l’anarchie
les tient sans cesse en suspens et toujours prêts à se jeter hors de la
liberté au premier désordre.

« Je conviendrai sans peine que la paix publique est un grand bien ;
mais je ne veux pas oublier cependant que c’est à travers le bon ordre
que tous les peuples sont arrivés à la tyrannie. Il ne s’ensuit pas
assurément que les peuples doivent mépriser la paix publique ; mais il
ne faut pas qu’elle leur suffise. Une nation qui ne demande à son
gouvernement que le maintien de l’ordre est déjà esclave au fond du cœur
; elle est esclave de son bien-être, et l’homme qui doit l’enchaîner
peut paraître. (…)

« Il n’est pas rare de voir alors sur la vaste scène du monde, ainsi que
sur nos théâtres, une multitude représentée par quelques hommes. Ceux-ci
parlent seuls au nom d’une foule absente ou inattentive ; seuls ils
agissent au milieu de l’immobilité universelle ; ils disposent, suivant
leur caprice, de toutes choses, ils changent les lois et tyrannisent à
leur gré les mœurs ; et l’on s’étonne en voyant le petit nombre de
faibles et d’indignes mains dans lesquelles peut tomber un grand peuple…

« Le naturel du pouvoir absolu, dans les siècles démocratiques, n’est ni
cruel ni sauvage, mais il est minutieux et tracassier. »

Alexis de Tocqueville

Extrait de ‘De la Démocratie en Amérique’, Livre II, 1840.

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commentaires

R
c'est rigolo... c'est un des auteurs qu'on étudie en socio... et ce texte est rééellement d'actualité... un peu comme Rousseau parfois ... ou encore Bourdieu et son inclassable livre la reproduction ou les héritiers...! à méditer!
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Z
tellement d'actualité qu'on a du mal à croire que cela a été écrit il y a si longtemps !bisouszab
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G
Faudrait que je l'imprime pour le lire celui-là...
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